La Turquie doit « faire beaucoup plus en son propre territoire afin de contrôler sa frontière, ce qu'il n'a pas achevé efficacement depuis la naissance de l'État Islamique », a déclaré le mardi dernier le secrétaire à la défense, Ash Carter, au Comité des services des forces armées. Le président Barack Obama souleva une remarque similaire lors d'une conférence de news, en disant que «les forces terrestres du côté turc de la frontière peuvent faire un bien meilleur travail dans l'obturation de la frontière ».
Ce dont ils parlent en termes moins diplomatiques est que : les 565-miles représentant la frontière de la Turquie avec la Syrie ont jusque-là été une véritable porte ouverte aux extrémistes, au financement du terrorisme et aux armes depuis que la guerre civile a éclaté en Syrie en 2011. Et le trafic fonctionne dans les deux sens. Le pétrole brut et les pièces d'antiquités sont parmi les biens vendus par l'intermédiaire d'hommes d'âge moyen en Turquie, dont les bénéfices essentiels servent au financement externe de l'ISIS.
Le problème de la frontière est très grave. Le mois dernier, le Département d'état avait annoncé une offre de «récompense pour justice » de 5 millions de dollars pour la prise de Tirad al-Jarba- également connu comme Abou-Mohammed al-Shimali- leader clé de l'État islamique « chargé de faciliter le déplacement de combattants terroristes étrangers principalement par Gaziantep en Turquie », « et faciliter les déplacement des volontaires venant d'Australie, de l'Europe, du Moyen-Orient et d'ailleurs pour servir en Syrie comme combattant de l'ISIS.
En Septembre, le département du Trésor a signalé 15 individus comme facilitateurs et financiers de l'ISIS afin de les bloquer du système financier des États-Unis. Le Yéménite Mu'tassim Yahya Ali al-Rumaysh, Tarad Mohammad Aljarba de l'Arabie saoudite, et Morad Laaboudi du Maroc ont été identifiés comme ayant opéré le long de la frontière turco-syrienne. Ces désignations renforcent le rôle central de la Turquie dans le financement de l'ISIS.
Ces mentions négatives directes de la Turquie - un allié de l'OTAN - par le pouvoir exécutif, sont rares. Ce ne sont pas des récriminations, mais elles reflètent la frustration croissante parmi les responsables américains après d'innombrables conversations bilatérales qui n'ont culminées en aucun changement.
Pour sa part, Ankara a commencé à reconnaître le problème. Mais la route qui lui fait face est rocailleuse. Les responsables turcs croyaient apparemment que l'ouverture de la frontière à un éventail de rebelles syriens pourrait aider à accélérer la chute de Bachar al-Assad. Mais comme la guerre de Syrie a traîné, des combattants sont venus s'enrôler dans des groupes djihadistes et, éventuellement, des extrémistes de l'état islamique. Au cours de la dernière année, alors que l'ISIS exploitait les politiques laxistes aux frontières de la Turquie, des agences affiliées se sont enracinées en Turquie. Ce qui signifie que contester le statu quo comporte des risques pour la Turquie, telle que l'attaque suicide de Juillet par un militant de l'ISIS dans la ville turque orientale de Suruc.
Et puisque la Turquie a abattu un avion de chasse russe la semaine dernière, une guerre verbale a éclaté entre Ankara et Moscou, incluant des accusations russes que la Turquie achète le pétrole de l'État islamique. Ce conflit a incité Washington et d'autres alliés de l'OTAN à défendre Ankara. Alors qu'un front uni aide à dissuader l'agression russe, faire pression sur la Turquie sera nécessaire pour sceller le passage le plus important de l'État islamique au monde extérieur.