Benjamin Netanyahu a atteint son objectif principal de rétablir les liens avec les États-Unis après huit ans de forte tension. Certes, le Premier ministre israélien et Donald Trump ont encore besoin de combler l'écart sur des questions ouvertes, telles que la diplomatie israélo-palestinienne et les implantations en Cisjordanie. Mais ils semblent être en phase sur un large éventail de questions régionales.
Cela pourrait mener à une percée sur une question d'importance stratégique pour Israël. Selon les rapports sur la rencontre des deux dirigeants du mercredi dernier, M. Netanyahu aurait demandé la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan.
Cette démarche a beaucoup de sens pour les deux parties. Elle octroierait au gouvernement israélien une victoire diplomatique tout en lançant un signal de l'administration de Trump à la Russie et à l'Iran sur les plans en cours des États-Unis envers la Syrie.
Rappelons qu'Israël à conquis la majeure partie du Golan syrien pendant la guerre de 1967 qu'elle annexa en 1981. Cette démarche a été condamnée par la communauté internationale.
Pour les deux régimes successifs d'Assad, le premier Hafiz et maintenant son fils Bashar, rétablir la pleine souveraineté syrienne sur le Golan a été une demande axiomatique. Israël a initié des retraits partiels du Golan au cours de plusieurs cycles de négociations de paix avec la Syrie durant les deux dernières décennies, sans toutefois qu'ils soient considérés comme suffisants pour les Syriens.
Avec le déclenchement de la guerre civile syrienne en 2011, les faits sur le terrain ont changés. Si Israël avait cédé le Golan à la Syrie, l'État islamique, Al-Qaïda ou l'Iran seraient déjà assis sur les rives de la Galilée en face de la ville israélienne de Tibériade.
M. Netanyahu et d'autres hauts responsables du gouvernement israélien affirment que la Syrie est destinée à être divisée selon des lignes sectaires, ethniques et régionales. Et tandis que la reprise d'Alep a déplacé la marée de la guerre en faveur du gouvernement d'Assad, certains Israéliens croient qu'il pourrait être temps de reconnaître la conquête d'Israël au Golan comme permanente.
Cette position n'a jusqu'ici trouvé aucune traction parmi les grandes puissances, qui disent toujours vouloir préserver une Syrie unitaire. La Russie, qui est intervenue militairement pour étayer Bashar Assad au nom de l'intégrité territoriale syrienne, en est la principale à s'opposer.
Un désaccord avec la Russie sur la Syrie est à anticiper. En reconnaissant la souveraineté d'Israël sur le Golan, l'administration Trump signifierait à la Russie que, même si Washington peut maintenant coordonner avec Moscou des activités telles que la lutte contre l'État islamique, il ne partage pas les objectifs de la Russie pour la Syrie.
De plus, cela démontrerait que les États-Unis adoptent une ligne plus sévère sur la fourniture d'armes et de renseignements à l'Iran et au Hezbollah.
La reconnaissance des revendications israéliennes sur le Golan serait aussi une confirmation que le petit État hébreu a besoin de ces hautes terres afin d'empêcher une multitude de menaces militaires asymétriques et conventionnelles de la Syrie - et tout ce qui pourrait surgir après sa guerre. Israël continue de cibler les gardiens de la révolution islamique iranienne et le Hezbollah pour les empêcher d'établir une base d'opérations sur le Golan syrien.
Reconnaître la souveraineté d'Israël sur le Golan atténuerait aussi la demande fondamentale des Palestiniens pour un État dans les frontières de 1967. Si une frontière internationale peut être révisée le long de la frontière syrienne, les Palestiniens auront plus de mal à présenter la ligne d'armistice de 1949 le long de la Cisjordanie comme inviolable. Cela pourrait ouvrir la voie à un compromis lorsque le gendre de M. Trump, Jared Kushner, entamera sa pression pour la paix palestino-israélienne.
Cette démarche irritera les Européens et les Nations Unies, mais la tempête passera. Les groupes d'opposition syriens protesteront également. Alors que certains pourraient être tentés de rompre leurs liens ténus avec Israël, ils comprennent que leur véritable ennemi est M. Assad.
De même, les États arabes exprimeront leur indignation, mais ils vont probablement voir le tableau d'ensemble. M. Assad est en désaccord avec la Ligue arabe, et un coup porté au régime d'Assad et à ses mécènes à Téhéran sera considéré comme une victoire par ces joueurs arabes régionaux, surtout si l'administration Trump indique clairement que c'est l'objectif.
Pour les Israéliens, le risque d'instabilité interne résultant du déménagement est faible. Les Arabes druzes du Golan, qui comptent environ 20 000 personnes, sont peu susceptibles de répondre avec agitation. Alors qu'ils professent la loyauté envers M. Assad, le carnage en Syrie a rendu la stabilité et la prospérité d'Israël de plus en plus attrayantes.
La demande de M. Netanyahu sera une surprise pour certains observateurs. Mais le premier ministre israélien a clairement étudié « L'art de l'affaire ». Il sait que son homologue aime penser grand et respecte ceux qui font la même chose.