Le dirigeant palestinien Mahmoud Abbas s'est rendu à l'ONU le mois dernier et a réussi à rapprocher son peuple vers le statut d'état. Au milieu de toute cette fanfare, les diplomates occidentaux avaient tranquillement concédé que le vote de l'Assemblée générale de l'ONU pour un état palestinien non-membre n'était pas simplement un pas en avant pour leur projet national. Il reflétait surtout leur désir de neutraliser l'influence croissante du Hamas, particulièrement après que celui-ci revendiquait une victoire sur Israël dans la toute dernière prise de mains de novembre dernier.
Avec l'écrasant vote (138 contre 9) pour conférer le statut d'observateur non-membre aux Palestiniens, la communauté internationale s'était apparemment surpassée. Les prochaines étapes d'Abbas restent cependant nébuleuses - il menace de poursuivre l'adhésion de la Palestine à la Cour pénale internationale, qu'il pourrait ensuite utiliser comme gourdin contre Israël - mais cette tactique risque de prendre des longues années avant de porter fruits.
Le vieillissant Abbas ne possède pas apparemment trop de temps devant lui. Le leader palestinien est âgé de 77 ans, c'est un gros fumeur et un constant voyageur. Il a été il y a une dizaine d'années traité du cancer de la prostate, et en 2010 il a été admis six fois dans un l'hôpital jordanien pour des raisons non spécifiées de santé. En bref, il n'est certainement pas dans une bonne forme. Cela ne manque évidemment pas de soulever une question gênante : qui sera son remplaçant ?
À l'heure actuelle, la réponse est le Hamas. Selon la Loi fondamentale palestinienne, Article 37, si la présidence de l'autorité palestinienne devient vacante « l'orateur du Conseil législatif palestinien assumera temporairement les pouvoirs et attributions de la présidence de l'autorité nationale pour une période ne devant ne pas dépasser soixante (60) jours, durant laquelle tiendront place des élections libres et directes pour élire un nouveau président. »
En fait, l'orateur actuel n'est autre qu'Aziz Dweik. En janvier 2006, Dweik s'était présenté comme candidat lors des toutes dernières élections législatives organisées par les palestiniens, et avait remporté la liste sur le changement et la réforme du Hamas. Lorsque le Hamas avait émergé avec une majorité après le vote, il avait prêté serment comme président.
Qui est donc ce chef de file dans les coulisses ? Il a passé deux décennies à fuir les services de sécurité israélienne. En 1992, Dweik était l'un des 415 membres du Hamas, exilés au Liban par Israël à cause de leur implication dans le groupe terroriste naissant. Suite à l'enlèvement du soldat israélien Gilad Shalit en 2006, les Israéliens l'avaient arrêté pour sa position d'adepte du Hamas. En juin 2009, Dweik, fut libéré de prison, mais fut encore une fois incarcéré en janvier pour « participation aux activités terroristes ». Quelques mois plus tard, en juillet, Il fut à nouveau libéré.
Dweik, n'est bien entendu pas une énigme. Une succession ne se déroule pas toujours conformément à la loi, et l'OLP peut encore désigner une personne de ses propres rangs si Abbas n'arrive plus à gérer ce corps. La lutte pour le pouvoir peut toutefois, dégénérer en recette pour un autre vilain choc entre l'OLP et le Hamas--peut-être même une reprise de la guerre civile sanglante de 2007, qui permit au Hamas la capture de Gaza. Pour l'instant, la santé d'Abbas et les fortunes politiques sont les seuls éléments qui se dressent sur le chemin de ce scénario chaotique.
La réputation politique d'Abbas pourrait être tout aussi déconcertante que son âge. Le Hamas ayant rossé le Fatah laïque d'Abbas aux élections de 2006 et expulsé ses forces de sécurité de la bande de Gaza en 2007, Abbas s'est fortement incliné vers les Etats-Unis et Israël, militairement, intelligemment et financièrement afin de maintenir son emprise fragile sur la rive occidentale. Son gouvernement, entre-temps, s'est ossifié, érodé par son soutien au sein de nombreux banquiers Occidentaux.
En septembre, suite à l'assèchement des coffres de l'AP - Autorité Palestinienne - et aux salaires impayés aux employés gouvernementaux, la frustration avait atteint son paroxysme provoquant des émeutes parmi des milliers de Palestiniens. Les manifestations ne manquèrent pas de soulever des doutes quant à l'effondrement éminent de l'autorité palestinienne. Les menaces récentes du ministre israélien des affaires étrangères Avigdor Lieberman de retenir les recettes fiscales de l'AP pour plusieurs mois n'ont faire que raviver ces préoccupations.
Abbas s'agrippe encore, mais semble être dans l'incapacité de tenir à autre chose qu'à sa chaise. Il n'a pas réussi à assurer la paix, mais ne s'engage pas ouvertement à la violence contre Israël. Cette approche qui « ne change rien au statu quo» explique pourquoi il n'a pas été fondamentalement décisif au cours de la récente conflagration entre Israël et le Hamas.
La question concernant le successeur d'Abbas n'est pas nouvelle. Selon une fuite d'un câble du département d'État américain, le négociateur palestinien Saeb Erekat aurait averti les américains déjà en 2006 qu'un « vide politique » risque d'octroyer à Dweik le rôle de président. D'autres partisans palestiniens ont aussi exprimé leurs inquiétudes sur le plan de relève de l'autorité palestinienne.
Abbas, cependant, refuse de nommer un successeur. Prenant exemple de son ancien allié, le président déchu Hosni Moubarak d'Égypte, il n'a aucun vice-président ni héritier présomptif. En guise, il mène des campagnes visant à affaiblir ses adversaires potentiels. Mohammed Dahlan, l'homme fortement populaire de Gaza sous Yasser Arafat, a subi un traitement particulièrement méchant d'Abbas, qui avait pris des mesures pour geler ses avoirs à l'étranger.
Les élections municipales du mois d'octobre en Cisjordanie ont ramené une poignée de dirigeants renégats du Fatah sur l'esplanade politique. Cette nouvelle récolte de laïcs relativement inconnus pourrait encore représenter le futur des palestiniens. Ghassan Shakaa, par exemple, attira l'attention du New York Times en tant que figure de proue « parmi des dizaines de militants du Fatah évincés du parti [en octobre] suite à leur décision de concourir indépendamment. » Au lieu d'embrasser la diversité politique, Abbas a préféré apparemment isoler ces figures--en leur refusant tout rôle aux festivités tenues après l'aval récent de l'ONU d'un état non-membre Palestinien.
Les rivaux potentiels d'Abbas ne peuvent non plus se tailler une niche aux urnes. En raison de l'amère discorde entre le Hamas et le Fatah, Abbas refuse de tenir de nouvelles élections nationales. Et Washington - craignant que le Hamas ne l'emporte aux urnes — le soutient entièrement.
En d'autres termes, Abbas a solidifié sa position de leader incontesté des Palestiniens, et il continuera dans cette position jusqu'au moment où il fera son choix ou trépassera.
Ce n'est pour ainsi dire, pas une stratégie viable pour maintenir un partenaire pour la paix en Cisjordanie. Cela non plus ne permet pas une manœuvre bureaucratique à l'ONU, qui a simplement accordé Abbas un coup de pouce temporaire en donnant son aval. De pareilles démarches, en fait, ne font qu'aggraver la crise de succession palestinienne et renforcent le leadership actuel sans vraiment l'encourager à appuyer des réformes indispensables.