Une semaine après le déclenchement de l'opération israélienne «Bordure de Protection » connue aussi sous le titre du Hamas « la guerre du 10 du Ramadan», Washington demeure vain. Le président Barack Obama a offert de servir d'intermédiaire pour négocier un cessez-le feu la semaine dernière, mais sa démarche est tombée sur des sourdes oreilles des deux côtés. Le Secrétaire d'état John Kerry a ensuite fait une visite surprise au Caire le lundi suite à un appel au calme. L'Égypte annonçait aussitôt un cessez-le feu, qui devait prendre effet le mardi matin à 9 heures. Les Israéliens ont accepté les termes, mais le Hamas a hésité, affirmant qu'il n'avait même pas été consulté. Les missiles continuaient de voler de Gaza, et les navires de guerre israéliens perpétuaient leur pilonnage des cibles dans l'enclave contrôlée par le Hamas.
La diplomatie américaine a manqué peut-être jusqu'ici, mais Washington demeure toujours décisif tout au moins, à l'égard de ce conflit.
Le Dôme de fer, un système de défense antimissile développé et financé avec l'aide des USA, aurait intercepté quelque 90% des missiles du Hamas chutant sur les centres de population israéliens. Le système est de 100% responsable du fait qu'il n'y a eu aucun décès israélien du début de ce conflit, à l'heure actuelle, en dépit du tir de plus de 400 missiles par le Hamas et d'autres groupes militants dans l'espace aérien israélien. Le Dôme de fer a permis aux israéliens d'attaquer, dans ce qui a été largement considéré comme une guerre unilatérale.
Les Israéliens sont profondément reconnaissants à l'Amérique pour cette remarquable technologie. Mais, durant ma rencontre avec plusieurs hauts responsables israéliens la semaine dernière, j'ai été frappé par leur fort désir d'établir la dissuasion dans une région qui tend à devenir plus dangereuse de jour en jour, et où l'influence américaine est parallèlement en déclin.
Et il ne s'agit pas seulement d'Israël. Appelez ça un « pivot », un «rééquilibrage» à l'heure actuelle, chaque leader dans la région sait très bien que les USA tentent de s'extraire du Moyen-Orient. Ils savent que le conflit actuel de Gaza, le massacre ininterrompu en Syrie et d'autres bouleversements régionaux sont une nuisance collective à cette Administration, qui a manifestement échoué à élaborer une politique étrangère au Moyen-Orient conforme ou cohérente, après six années de tourmente.
La fiabilité des États-Unis a piqué du nez après le fameux virement de la « ligne rouge » d'Obama appliqué à la Syrie en Septembre. Elle plongea davantage en mai, suite à la tentative inopportune de Kerry de négocier un accord de paix entre les Palestiniens et les Israéliens, voué à l'échec. Cela n'aide en rien l'Égypte, courtier traditionnel des américains, d'instaurer le calme entre le Hamas et les Israéliens, qui échoue à sa première tentative d'exécuter les ordres de Washington. Mais c'est aussi sans surprise. L'Égypte a quitté l'orbite de Washington depuis que l'administration a réduit le financement suite au coup d'état de l'an dernier précédant la montée de l'homme fort de l'armée, Abdel Fattah al-Sisi.
Pour être juste, il est même peu probable que le prédécesseur de Sisi, Mohammed Morsi, leader déchu de la confrérie musulmane d'Égypte qui avait négocié le dernier cessez-le feu avec le Hamas en Novembre 2012 grâce à ses liens de longue date avec le groupe, puisse insuffler un peu de bon sens en ce moment au Hamas. Comme me l'avaient confirmé les responsables jordaniens la semaine dernière, le Hamas est maintenant disloqué. Il a au moins quatre centres de pouvoir : la bande de Gaza, la Cisjordanie, des leaders externes et d'autres militaires. Traiter avec un Hamas unifié strident et intransigeant était une tâche assez ardue. Négocier avec un Hamas fragmenté, l'est encore plus.
Néanmoins, quelques pays de la région sont prêts à battre l'indolence excessive de Washington. Il y a un climat croissant de peur dérivant des négociations menées par les USA avec l'Iran sur son programme nucléaire illicite. Un ancien responsable haut gradé du renseignement des États-Unis me confiait, «la crainte est que les Iraniens vont faire semblant d'abandonner leur programme nucléaire, alors que les États-Unis feront semblant d'y croire ».
Les pourparlers tenant place actuellement à Vienne, ont sans aucun doute aidé à extraire l'Iran de son isolement après les nombreuses années de sanctions internationales. Mais les six puissances mondiales (connues sous le nom de P5 +1) sont si impatientes d'arriver à un accord sur le nucléaire, qu'elles ont largement ignoré d'autres mauvais aspects et comportements de Téhéran. Les roquettes à longue portée tirées par le Hamas sur Israël ? Elles sont de fabrication iranienne, reproduites ou obtenues en fraude. Le massacre par le régime Assad de Syrie ? Aidé et encouragé par les Gardiens de la révolution iraniens et leur proxy libanais, le Hezbollah.
Malgré cela, et au grand dam des dirigeants de la région, Washington a diminué la pression des sanctions en 2013, et même l'avait secouru avec 7 milliards de dollars en allégeant les sanctions en échange au gel simple de six mois de son programme nucléaire. Cela a permis de ranimer l'économique modeste iranienne après une récession assez sévère, améliorant ainsi l'effet de levier de l'Iran à la table de négociation. Il se peut aussi qu'il y gagne d'avantageuses faveurs si les négociations nucléaires se prolongent. Simultanément, certains responsables de l'Administration sont même tentés de coopérer avec Téhéran, état qui parraine le terrorisme depuis 1984, pour trancher la marche du groupe terroriste sunnite connu comme l'État islamique (alternativement connu comme ISIL et ISIS) à travers l'Irak.
Au milieu de cette agitation et de l'ambiguïté morale, certains alliés des États-Unis contestent ouvertement à présent la politique de Washington dans la région. Le Qatar et la Turquie, par exemple, ont émergé comme des champions inconditionnels du Hamas au cours de ces dernières années. Le chef du politburo du Hamas a fait la navette entre les deux pays cette semaine, cherchant conseil, après des années de quête de subvention et de pluie d'argent liquide. Ces deux pays ont également soutenu sans vergogne plusieurs groupes djihadistes, actifs à l'heure actuelle en Syrie. Le Qatar, quant à lui, a récemment négocié au nom des talibans l'échange de Bowe Bergdahl contre des prisonniers. La Turquie a aidé l'Iran à échapper aux sanctions sur au moins 13 milliards de dollars, et peut-être plus, selon les rapports des news turques qu'un réseau turco-iranien a fait 100 milliards de dollars dans des transactions commerciales illicites.
Ces activités ont rendu la Turquie et le Qatar amiennemies des États-Unis - ni amis ni ennemis. Mais Washington cherche toujours à les conserver. Pourquoi ? Parce que la Maison Blanche a de moins en moins d'influence au Moyen-Orient, et a encore moins de véritables amis. L'absence d'un mandataire solide des US dans la région pour négocier un cessez-le feu entre Israël et le Hamas en est peut-être l'exemple le plus récent de cette tendance.
Qu'est-ce que tout cela veut dire ? À court terme, la guerre de Gaza peut s'étendre plus longtemps que quiconque l'anticipe, attisant les flammes d'une région déjà en feu. À plus long terme, ce conflit, peu importe sa durée, va alimenter la perception que les États-Unis ont complètement perdu le contrôle de cette région stratégique.