Le Hezbollah, milice libanaise et parti politique, est à l'heure actuelle, l'acteur le plus puissant au Liban. Depuis le dernier conflit déclenché par le Hezbollah contre Israël en 2006, le groupe a accumulé un arsenal militaire capable de rivaliser avec celui d'une armée conventionnelle, tout en devenant l'agent de pouvoir politique le plus important du Liban. Pour ceux qui considèrent le Hezbollah comme une force déstabilisatrice, ayant des liens aussi bien avec le terrorisme qu'avec l'Iran, la question est de savoir comment braver cette ascension fulgurante.
Aux États-Unis, le Congrès a pris le débat très au sérieux. Compte tenu de la domination du Hezbollah sur les affaires financières, militaires et politiques du Liban, certains se demandent si c'est encore dans l'intérêt des États-Unis de perpétuer le financement des forces armées libanaises (LAF), traditionnellement considérées comme un contrôle sur le Hezbollah. Une rupture avec le Liban se traduirait par son abandon à l'Iran : erreur grave, tant diplomatique que tactique. En guise, le Comité des affaires étrangères de la Chambre prémédite la passation d'une Loi sur les amendements à la prévention du financement international du Hezbollah (HIFPAA). Ce projet de loi comprendra une série de nouvelles sanctions visant à châtier le Hezbollah pour ses liens avec le terrorisme international, en ciblant son activité financière domestique. Cependant, le HIFPAA pourrait ne pas aller assez loin. Afin de réduire la montée du Hezbollah et de renforcer ceux qui au Liban s'alignent sur les intérêts des États-Unis, le Congrès va devoir demander à la Maison Blanche de désigner les régions contrôlées par le Hezbollah comme zones de « préoccupation primaire pour le blanchiment d'argent » en vertu de l'article 311 de l'Act Patriot des États-Unis.
Cette démarche nouvelle et décisive isolerait les entités financières opérant dans des territoires relevant du contrôle du Hezbollah - dont le sud du Liban, la vallée de Beqaa et Dahiyeh dans la banlieue de Beyrouth - interdisant les relations de correspondance entre eux et toute institution de système financier américain. Le caractère généralisé d'une désignation de l'article 311 le rend plus puissant que les sanctions ciblées incluses dans le projet actuel de loi HIFPAA. Par ailleurs, en appliquant spécifiquement et exclusivement l'article 311 dans les zones libanaises contrôlées par le Hezbollah, les États-Unis auront la possibilité de soutenir les éléments de l'État qui résistent aux tentatives du Hezbollah de s'incruster.
L'idée d'employer l'article 311 pour sanctionner une zone géographique sous-jacente est nouvelle, mais elle est entièrement justifiable. L'article 311 a servi pour punir à cinq reprises les États suivants : le Nauru et l'Ukraine en 2002, la Birmanie en 2003, l'Iran en 2011 et la Corée du Nord en 2016. Bien que cette loi n'intente pas la sanction de cantons géographiques, le langage formel autorise le Trésor de choisir une « juridiction » comme cible. L'Act Patriot laisse la définition de ce terme ouverte. Alternativement, l'article 311 autorise la sanction de certaines institutions financières, et des catégories de transactions ou des types de comptes, dont, vraisemblablement, tous ceux localisés dans une zone géographique déterminée. L'usage de l'article 311 pour cibler les zones contrôlées par le Hezbollah et les sanctionner n'enfreint ni le corps ni l'esprit de L'Act patriot.
Certains prétendront, à juste titre, que les retombées économiques et politiques associées à cette action pourraient être excellentes. Par exemple, le Premier ministre et le président libanais ont exprimé leur scepticisme quant à la nécessité de nouvelles sanctions, alors que le président affirmait que de nouvelles sanctions pourraient causer «de grands dégâts au Liban et à ses habitants ». Pour être sûr, appliquer l'article 311 aux zones contrôlées par le Hezbollah peindra en noir un grand nombre d'entreprises et de banques, principalement dans les zones chiites. Cela risque de provoquer une panique au sein de la population libanaise, du LAF et de la communauté bancaire. Mais les retombées peuvent être modérées et les conséquences involontaires atténuées. Le Trésor devrait travailler avec la banque centrale libanaise pour isoler les succursales bancaires dans les zones contrôlées par le Hezbollah, protégeant ainsi l'intégrité du système bancaire libanais traditionnel tout en paralysant les capacités financières du Hezbollah. La banque centrale libanaise accorde déjà la priorité à l'accès au système financier international, et a publié des comptes liés au Hezbollah dans le passé. Avec la coopération du Trésor américain, l'article 311 pourrait effectivement cibler le Hezbollah et non l'économie libanaise de manière plus générale.
Les États-Unis doivent prendre des mesures urgentes et solides afin d'étayer les éléments libanais qui ont résisté à la montée du Hezbollah, groupe violent affilié à la terreur tout en entretenant des rapports étroits avec l'Iran, l'antagoniste le plus virulent de l'Amérique de la région. Sans cette initiative, le Hezbollah et ses partisans pourront continuer leur ascension constante sans aucun contrôle. La bataille pour l'avenir du Liban est en cours ; il appartient maintenant au Congrès de s'y associer efficacement.